Douala: Cinq morts et 200 millions Fcfa emportés dans un braquage à Ecobank
- 21 mars 2011
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Pendant deux heures, des pirates ont fait au moins cinq morts et emporté 200 millions F.Cfa à l’agence Ecobank de Bonabéri. Bakassi également attaqué par les mêmes assaillants.
Des hommes armés, non identifiés, ont attaqué l’agence Ecobank de Bonabéri à Douala dans le nuit du vendredi au samedi 19 mars 2011. Le braquage a duré deux heures, soit de 23h à 1h du matin, au lieu dit « quatre étages ». Les assaillants qui étaient vingt au total ont emporté un butin de 200 millions F.Cfa, après avoir dynamité la partie arrière du bâtiment. Les tirs aveugles des assaillants ont fait au moins cinq morts, ainsi que de nombreux blessés. Les assaillants ont ouvert le feu sur un pick-up de la société de gardiennage G4S, à bord duquel se trouvaient deux vigiles chargés de faire la ronde.
Alingou, 29 ans, s’en sort indemne, mais son coéquipier reçoit deux balles dans le crâne. La victime, âgée de 35 ans, rend l’âme en chemin alors qu’il est transporté de l’hôpital protestant Cebec de Bonabéri pour l’hôpital Laquintinie. De passage, un véhicule Coaster de l’agence de voyages Feric a été criblé de balles. Un mort sur le champ. Le chauffeur est grièvement blessé. Un camion de sapeurs pompiers en route pour une intervention au quartier Ndobo a également été pris au piège. Sans aucun dégât, à en croire l’adjudant Abaté qui faisait partie de l’équipe. Un mototaximan de passage est pris entre les feux et rend l’âme. Un malade mental est aussi tué. Au petit matin, son cadavre gisait dans une marre de sang, à côté de son sac et ses autres effets. Un autre passant a trouvé la mort.
En fin de compte, plusieurs blessés ont été enregistrés dont six admis à l’hôpital de district de Bonassama. L’hôpital protestant Cebec de Bonabéri en a reçu quatre. Les corps des victimes ont été déposés à la morgue de l’hôpital militaire à Bonanjo. Aucun bilan officiel n’a été établi. Samedi au petit matin, les riverains qui ont été pris de peur toute la nuit, ont raconté l’horreur :
« Les braqueurs ont tiré sur tout ce qui bougeait. Les gens ont couru à toutes jambes. Beaucoup se sont étalés par terre dans les bars. D’autres ont fui le champ de tirs, serrés à cinq sur une moto »,
raconte papa Santiago, témoin du carnage qui a duré deux heures. « C’était comme au far-west à la télé. Les balles fusaient de toutes parts », raconte un riverain. « A la maison, tout le monde est resté allongé. Au début, on a cru que les câbles électriques de haute tension ont pris feu », dit Madeleine, une habitante de « quatre étages ».
Selon les informations émanant des services de sécurité, les assaillants sont arrivés à Bonabéri par le fleuve Wouri, et ont accosté au lieu dit « Fond back » à Ngwèlè carrière. Ils y ont laissé leurs embarcations à moteur et emprunté un fourgon pour parcourir les quelques 3 km qui mènent au lieu de leur attaque, non loin de la gare routière de Sodiko. C’est dans ce même véhicule que les brigands apprêtent leurs armes et les minutions. Les témoins de la scène décrivent des bandits vêtus de T-shirts et de culottes, arborant des bandeaux et portant des cagoules. Avant de s’en aller, ils se sont servis dans un bar déserté. « J’ai trouvé posées par terre deux bouteilles de bière non décapsulées », soutient Hortense Tchouangue, la propriétaire dudit bistrot.
Les cameras de surveillance de la banque ont enregistré les images de 18 hommes encagoulés et deux autres opérant à découvert. Réaction Des gendarmes et d’autres éléments des forces de sécurité arrivent pendant les tirs. Ceux-ci n’attaquent pas, mais empruntent une voie pour contourner le bâtiment abritant l’agence Ecobank. Peu après, les assaillants repartent comme ils sont venus, cette fois à bord du pick-up des vigiles de G4S attaqués plus tôt. Ils sont pris en chasse par des éléments du Bataillon d’intervention rapide (Bir) et du Groupement polyvalent d’intervention de la gendarmerie (Gpign), alertés eux aussi. La course poursuite sur près de 3km est infructueuse. Une fois au bord de l’eau, les fuyards disparaissent dans leurs barques.
Mais des témoins et une source au sein du Bir affirment qu’un des assaillants est arrêté car, abandonné sur la côté par les siens. « Un des voleurs s’est caché dans les buissons, mais a été découvert », affirme une riveraine. Un soldat ajoute que la présence du bandit a été signalée par un habitant du coin. Tout comme celle du chauffeur du fourgon dissimulé entre des maisons voisines sur le site de l’opération. Les assaillants étaient bien équipés, indiquent des sources policières. Au cours de la visite des autorités sur les lieux de l’assaut, l’on a appris que 200 millions F.Cfa ont été emportés. L’argent n’était pas dans le coffre-fort, mais dans des sacs. Par ailleurs, Le Jour a appris que lors de leur repli en mer, les assaillants ont attaqué une patrouille de deux « gun boats » du Bir près de la zone pétrolière, faisant au moins quatre blessés camerounais.
Mathias Mouendé Ngamo et Assongmo Necdem (Le Jour)
Bilan de l’attaque
Hôpital garnison militaire Quatre morts Des blessés identifiés
Hôpital protestant de Bonabéri Cebec Elise Mbougio, 30 ans, une balle au ventre Robert Alingou, 29 ans, vigile à G4s YvesEmile Yemdjo, 40 ans, commerçant, interné en chirurgie, deux balles dans la cuisse Un mototaxi, effleuré par une balle au niveau du ventre.
Hôpital de district de Bonassama André Elha, 24 ansJean Kuissi, 54 ans Joseph Lang, 35 ans Justin Ndam, 25 ans Mbenjou Ekwalla Joël Alexis, policier au commissariat central N°3, blessé aux doigts pendant la manœuvre. Nguomatcha, 6 ans, transféré à l’hôpital Laquintinie de Douala.
Votre avis:
Que pensez-vous de l’assaut perpétré à Bonabéri par des inconnus?
Gilbert Gervais Biem, passager: « C’était comme un film »
Je me rendais à un deuil dans la région de l’Ouest. Notre car est arrivé à Sodiko vers 23h. Nous avons été surpris par des coups de feu. On nous a informés que des malfrats armés s’attaquaient à tout le monde et tiraient des balles dans tous les sens. Tous les passagers ont quitté le véhicule. Etant le seul invalide, j’ai eu toute la peine pour m’en sortir. Je suis allé me réfugier au commissariat central N°3 à Bonassama. C’était comme un film pour moi. J’ai été déstabilisé. Je ne comprends pas comment les assaillants ont pu repartir par les eaux et les forces de l’ordre n’ont pas pu placer un dispositif pour les coincer.
Bertrand Kameni, commerçant: “Les forces de l’ordre inefficaces”
A mon avis, ce sont des spécialistes qui ont opéré à Bonabéri. Mais il n’empêche que les forces de l’ordre ont été inefficaces sur le coup. En deux heures de tirs, ils ont eu largement du temps de se préparer et de répondre à l’attaque. Le terrain de tir n’était pas situé à un endroit reculé de la ville, pour prétexter qu’il fallait du temps pour s’y rendre. Je pense d’ailleurs que les forces de l’ordre ne se risquent pas assez pour protéger la vie des civils.
Arno Noubissie, commerçant: « Il y a défaillance de l’armée »
Pour moi, il y a défaillance de l’armée. Les forces de l’ordre sont formées pour protéger le pays et intervenir à toute forme d’attaque qu’elle soit terrestre, maritime ou aérienne. Avec des unités de police et de gendarmerie établies à quelques mètres du champ de tir, quelle riposte a été organisée pendant les deux heures d’attaque ?
Propos recueillis par Mathias Mouendé Ngamo