Naomie Okala, la présidente de l'association Femmes aux consoles qui promeut la pratique de l'ESport féminin au Cameroun

La présidente de l’association Femmes aux consoles parle des préjugés qui bloquent l’évolution des femmes dans la pratique de l’E-Sport au Cameroun.

Quel est l’objectif de l’association Femmes aux consoles que vous venez de créer ?

L’objectif fondamental est de favoriser la pratique des femmes aux jeux électroniques. C’est de se dire que si aujourd’hui nous avons dix femmes qui de manière occasionnelle ou régulière jouent aux jeux-vidéos, il faudrait que grâce au soutien de l’association, on monte à quatre-vingt femmes. En objectif secondaire, on a aussi un besoin d’éduquer les femmes à l’environnement des métiers liés à l’E-Sport.

Qu’est-ce qui vous motive à mettre sur pied une telle association ?

C’est parti d’un constat fait sur le terrain. Il y avait très peu de femmes qui participaient aux compétitions faites par les marques. Et lorsqu’elles y participaient, et qu’elles arrivaient à un certain niveau, elles étaient sujettes à des moqueries, des commentaires sexistes. Lorsque je les approchaient, elles me disaient qu’elles ne voulaient plus revenir dans cet environnement, parce que même quand elles ont gagné, leur victoire est remise en cause. On leur dit que c’est sur qu’elles ont déconcentré leur adversaire avec leurs atouts ou leurs apparences. Je me suis dit qu’il est temps de créer une association où les femmes vont se sentir à l’aise et pouvoir grandir ensemble pour se professionnaliser et venir maintenant dans l’environnement normal pour compétir et faire face à tous ces commentaires sexistes.

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Il y a visiblement des préjugés qui bloquent l’évolution des femmes dans cette discipline …

… Oui, il y a beaucoup de préjugés. Il y a le patriarcat. Dès la base en éducation, le parent n’achète pas forcément une console à la femme. On achète généralement la poupée. C’est normal. Les femmes sont les mères porteuses mais aussi celles qui éduquent les enfants. Mais je peux vous dire que la pratique du jeu-vidéo en elle-même développe beaucoup d’autres  reflexes. On reste très éveillé. La concentration est là. C’est aussi une sorte de sport. Au-delà des préjugés du patriarcat, on a aussi des femmes qui se disent elles-mêmes qu’elles ne peuvent pas évoluer dans ce milieu qui est majoritairement masculin. Quand elles essaient même, les mamans les disent que ce n’est pas pour les filles. C’est pour les filles qui ne réussissent pas leur vie. Il y a ce blocage. Ce sont les principaux préjugés auxquels nous sommes liées dans la pratique de l’E-Sport au féminin.

Y a -t-il à ce jour des femmes qui se démarquent dans cette discipline de l’E-Sport au Cameroun ?   

Il y en a. On a déjà Christina Amayagna qui vient d’un tournoi panafricain, où il y avait huit nationalités en compétition, dont le Cameroun, Madagascar, le Bénin, le Congo et d’autres pays que j’oublie. Notre compatriote est sortie troisième. C’était sa première participation à un tournoi panafricain 100% femmes. On a aussi Sara Motassi qui a une Licencie en Economie, qui a participé il y a deux ans à un tournoi international aux Emirates Arabes Unis. Un tournoi afro-arabe, où elle est sortie 5ème. Elle a été battue parce que la Russe qui était là avait toute une délégation derrière elle. Nous, n’ayant pas les moyens, Sara était seule. Tout de suite, il y a eu cette fébrilité de gestion de compétition. C’est pour dire que les femmes peuvent et peuvent ramener des médailles. Ça peut être une activités génératrices de revenus aussi pour elles, au-delà du divertissement.

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Comment s’organisent les joueuses lorsqu’il y a une compétition en vue ?

Il y a plusieurs compétitions. Pour participer, généralement quand les tournois sont lancés, on a des calendriers. Il y a des qualifications régionales. En interne comment on s’organise ? Avant c’était du bouche à oreille. Aujourd’hui avec Femmes aux consoles, c’est de se dire qu’on regroupe toutes ces filles qui jouent à tous ces jeux de communauté. Et lorsqu’il y a une compétition à l’international, si elles sont six à jouer à un jeu de football par exemple, on les met en compétition. La meilleure va en Boot Camp entrainée par un mentor. Elle va maintenant compétir pour notre nation et aller à l’international. C’est ce que nous mettons en place. Sur le plan national il y a des compétition de E-Sport qui sont organisées au Cameroun, mais pas de façon régulière.

Propos recueillis par Mathias Mouendé Ngamo