Marché des femmes de Douala,jeudi 4 mars 2021. Crédit Photo: Moustapha Oumarou

Créé en 1975, cet espace marchand situé en plein cœur de l’arrondissement de Douala 2ème, à quelques encablures du Marché Central, est bien connu par la gente féminine qui s’y ravitaille en pagnes et autres accessoires vestimentaires.  

Des mototaximen vont et viennent. Des femmes assises près des comptoirs proposent des vêtements. D’autres vendeuses sillonnent le long de la rue, tenant leurs articles en main. Ici, des mannequins vêtus de tenues vestimentaires de différents modèles attirent les regards. Là, des porte-tout transformés en comptoirs accueillent de potentiels clients.

D’autres marchands encore ont étalé leurs articles à même le sol, sur du plastique. Il est 10h30 ce mercredi 17 février 2021. Nous sommes au marché des femmes dans l’arrondissement de Douala 2ème, à quelques encablures du marché Central. L’endroit grouille de monde. Des centaines de commerçants et usagers sont présents ce matin.

Il est difficile de se frayer un chemin au milieu de toute cette foule. C’est dans cette affluence que Constance Megnon cherche sa clientèle. Mère de trois enfants, cette commerçante s’est installée au marché des femmes depuis quatre ans. Elle tient dans ses mains des cartes de visite qui renseignent sur les offres de sa boutique.

« Je vends des articles pour la layette et des vêtements pour enfants de 0 à 10 ans dans une boutique pas loin d’ici. Je viens ici chaque matin, afin de trouver de nouvelles clientes »,

indique Constance Megnon.

Elle cible en priorité les femmes enceintes. Elle les accoste et chemine avec elle pour tenter de les convaincre.

Des hommes au marché des femmes de Douala

Plusieurs autres vendeuses du marché des femmes de Douala proposent dans leurs boutiques des robes amples, communément appelés kaba. Il y en a pour tous les modèles, couleurs et tailles. On y retrouve le kaba cellulaire, le Kaba avion, le kaba aux manches longues, le kaba orné de bazin ou de dentelles… Les lundi et jeudi sont connus ici comme les jours de grand déballage de kaba en tissus pagne.

Ces robes cousues par les commerçantes sont bradées sur place à des prix abordables (à partir de 1500 F. Cfa). Il vaut mieux aller se ravitailler avant 10h pour espérer trouver de meilleures pièces à  de bons prix, apprend-on. D’autres commerçantes se joignent aux clientes pour s’approvisionner aussi et revendre plus tard les articles sur leurs comptoirs, un peu plus chers.

Au marché des femmes de Douala, ce n’est pas qu’une affaire de femmes. Des hommes aussi proposent des marchandises à la clientèle. C’est le cas de ce sexagénaire lancé dans le commerce des babouches depuis vingt ans pour subvenir aux besoins de sa famille. Ses articles coûtent entre 1 000 et 3 500 F. Cfa.

« J’ai commencé par la vente des sous-vêtements. Mais comme ce n’était pas très rentable, je me suis lancé dans la vente des babouches. Je viens au marché à 6h30 et je rentre à 18h comme tout le monde »,

indique -t-il.

Le commerçant n’est pas le seul homme de ce marché. D’autres hommes postés dans les boutiques proposent des articles.

Des pagnes pour toutes les cérémonies

Dans ce marché qui propose des pagnes, vêtements, sous-vêtements, layette, babouches, perruques et autres accessoires vestimentaires, la clientèle se recrute principalement chez les femmes. Les clients viennent de divers horizons de la capitale économique du Cameroun pour se ravitailler. Alice Ketcha, jeune élève en classe de Première au lycée de New Bell, est à la recherche ce matin de quelques vêtements qu’elle pourra offrir à l’une de ses amies.

« J’aime faire mes achats ici parce que les articles sont moins chers et de bonne qualité comparablement à ceux qui sont dans les autres marchés. En plus, ici je sais où trouver chaque article. J’ai déjà mes repères et le marché n’est pas loin de mon école »,

fait savoir l’élève.

Une autre cliente, habituée des lieux, note que le marché des femmes, comme le Marché Central, est l’un des coins idéals où les populations de la ville de Douala se rendent pour le choix et l’achat de grande quantités de pagnes pour les cérémonies de mariage, de deuil ou autres célébrations.

Sur le plan organisationnel, le marché des femmes est placé sous la houlette d’un comité de gestion dirigé par la mairie de Douala 2ème. Ce comité est constitué d’un administrateur adjoint, d’un commissaire au compte, d’un secrétaire et d’un conseiller. « Le comité a été créé pour servir d’intermédiaire entre les commerçants et la mairie. Nous régulons également la vie ici au marché et mettons de l’ordre en cas d’insécurité ou de différends entre les commerçants», explique Fidèle Kayi, le commissaire au compte de ce comité de gestion.

A la genèse du marché

Il exerce lui-même comme commerçant au marché des femmes de Douala depuis 1999. A l’instar des autres commerçants de cet espace marchand, Fidèle Kayi a vu son chiffre d’affaires chuté à cause de la Covid-19. « Avec l’arrivée du coronavirus, le marché est dans une mauvaise passe. Nous n’arrivons plus à vendre comme avant et ça cause beaucoup de problèmes à tout le monde », déplore-t-il. La pandémie sévit toujours, mais la plupart des commerçants n’arborent pas de cache-nez.

Créé en 1975 à l’initiative d’une femme politique nommée Ketcha, le marché des femmes de Douala était réservé en grande partie à la vente des produits artisanaux. Les petites commerçantes proposaient des articles confectionnés à la main. Les morceaux de carton étalés à même le sol qui servaient de comptoirs étaient aussi achalandés de vêtements, sous vêtements, chaussures, objets de décoration et bien d’autres accessoires. Les vendeuses se rendaient au marché à 4h30 du matin et remballaient leur marchandise aux environs de 9h.

C’est à partir de 1980 que le marché des femmes de Douala commence à se vulgariser. Les commerçantes affluent dès lors des différents coins de la ville pour vendre leurs articles. De nos jours, l’espace marchand compte 1200 boutiques, d’après le dernier recensement effectué en 2020. Les articles sont désormais soigneusement rangés dans des boutiques, même si d’autres petits débrouillards occupent toujours la voie publique. Les produits artisanaux sont encore proposés ici, par quelques “doyennes” du marché.

Nazira Aroun (Stagiaire) avec la Rédaction