Au Cameroun, le Ghost Town bloque les voyages vers les régions anglophones du lundi au vendredi
- 18 septembre 2025
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Le durcissement des mesures des séparatistes dans la crise anglophone immobilise du lundi au vendredi à Douala, les bus des agences de voyages qui desservent les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
La vie s’est arrêtée à la gare routière de Bonabéri à Douala. Aucun vrombissement de moteur. Aucun klaxon. Pas d’appel de passagers ni de bruits de pas dans ce coin très souvent bruyant. Tous les véhicules sont à l’arrêt. On dirait un gigantesque parking abandonné. Seules deux personnes sont présentes dans le mini hall de l’agence Golden Express ce jeudi 18 septembre 2025 à 11h30. Ce ne sont pas des passagers. Ils sont venus expédier des colis à travers cette compagnie de transport qui dessert les localités de la région du Sud-Ouest. Seulement, leurs paquets ne pourront être embarqués que samedi matin.
La nouvelle mesure dictée par les sécessionnistes dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest imposent désormais le Ghost Town (villes mortes) du lundi au vendredi. Aucune circulation n’est autorisée, selon la prescription des séparatistes. Deux semaines déjà que ça dure. La conséquence est sans appel pour les agences de transport qui rallient les deux régions anglophones.
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“On faisait plus de 70 départs par jour”

Tous les bus, car Hiace, véhicules Picnic et autres gros porteurs de Golden Express, Mondial Express, Fresh-Hill, The People’s Express, Amour Mezam, Vatican ou encore Manyu Express sont cloués au sol. Chez Golden Express, c’est quelques 450 véhicules mis ainsi hors services. Le trafic a pris un grand coup, les entrées financières aussi.
« Tout est fermé. Les clients ne viennent plus, parce qu’aucune voiture ne peut bouger. Tout le monde a peur. Par jour, on recevait des centaines de passagers. On faisait plus de 70 départs par jour. Plus un seul n’est possible du lundi au vendredi, depuis deux semaines », déplore Joël Nchamcham, le responsable du service colis chez Golden Express.
Il fait remarquer que même les samedi et dimanche, jours autorisés à la circulation, les activités tournent au ralenti. Pour cause, la peur des passagers. A peine quinze départs en direction du Sud-Ouest au compteur de Golden Express samedi dernier.
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« Obéir au Ghost Town pour sauver nos vies »
Les chauffeurs de ces différentes agences ciblées par la nouvelle mesure en vigueur dans les régions anglophones, sans emplois, vadrouillent. C’est le cas de Godlove Shu. Chaque matin, il se rend à la gare routière de Bonabéri à l’effet de « chauffer le moteur de son car Hiace », puis déambule pendant quelques heures et rejoint son domicile plus tard. Chez The People’s Express ce jeudi midi, Samuel Neba, un chauffeur, est assis sur un roue de véhicule. Il regarde son convoyeur remplacer une plaquette sur un pneu arrière de son gros porteur. Le conducteur est désemparé. « On ne peut rien faire, à part obéir pour sauver nos vies. Si nous allons contre leur prescription, on peut être kidnappé ou abattu », craint Samuel Neba.
Les compagnies de voyages qui desservent les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont obligées de se réorganiser, sans toutefois franchir la ligne rouge. Ce vendredi dans la nuit, les bus Vip de Garanti Express et Vatican sont prévus à 20h30 et 21h30. Les bus classiques à 22h30. L’objectif, se retrouver aux portes de Bamenda samedi matin, jour exempt de Ghost Town dans les régions anglophones. Chez The People’s Express, on indique que deux gros porteurs embarqueront des passagers à Bonabéri pour Bamenda dans le Nord-Ouest, vendredi soir.
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Les commerces impactés

Un autre bus gros porteur vide quittera de la gare routière de Bonabéri samedi matin pour se rendre à Buea, afin d’y embarquer des passagers dans son agence, en direction de Bamenda. Des mesures qui ne comblent aucunement les lourdes pertes financières enregistrées. Aucune agence n’ose défier cette mesure de Ghost Town dans les régions anglophones. Les délais de fin d’application n’ont pas été communiqués.
Le souvenir de ce bus gros porteur de l’agence Amour Mezam mis en feu vers Santa dans le Nord-Ouest ou encore celui de Vatican Express attaqué en pleine agence restent vivaces dans les mémoires. L’absence d’activité des agences de voyages du lundi au vendredi paralyse également les activités commerciales à la gare routière de Bonabéri. Les boutiques et autres débits de boissons sont fermés. Seuls quelques rares commerces subsistent. Ces derniers déplorent la rareté des clients. « La gare routière de Bonabéri est morte depuis. C’est cette ligne du Nord-Ouest et Sud-Ouest qui nous sauvaient ici. Les gens qui nous faisaient la recette ne sont plus là. C’est seulement le samedi et dimanche qu’on peut espérer faire un peu de bénéfice qui ne peut malheureusement tenir sur une semaine », déplore un boutiquier.
Mathias Mouendé Ngamo




















