Découverte: Dans les coins et recoins de Mambanda
- 6 mars 2014
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Ce quartier populaire situé à Bonabéri, dans l’arrondissement de Douala 4ème au Cameroun, connait une forte concentration humaine et une activité économique variée qui conduisent, non sans embûches, cette partie de la ville sur la voie du développement.
Voila un quartier dont la réputation dépasse les frontières de l’arrondissement de Douala 4ème. Des faits de société y sont enregistrés au quotidien. Il y a toujours quelque chose susceptible de retenir l’attention ou de marquer les esprits des gens dans cette partie de la ville située sur la rive gauche du fleuve Wouri, à Bonabéri. La curiosité est grande d’y aller. L’expédition commence au lieu-dit Cimetière « Kotto Bass », sur la Nouvelle route de Bonabéri. Près de quinze conducteurs de mototaxis stationnés ici attendent de potentiels clients. Le prix de la course est vite négocié. Le véhicule à deux roues emprunte une voie non bitumée qui passe près du cimetière. Des nids de poule jonchent le chemin. La poussière s’élève. La moto fait des slaloms. Au bout de trois minutes, le décor du quartier Mambanda s’affiche.
L’ambiance est plutôt bruyante ce matin. Des petits commerces sont établis de part et d’autres de la voie. Il s’agit d’ateliers de transformation de bois, des boutiques spécialisées dans la vente de produits alimentaires, entre autres. Des débits de boissons poussent un peu partout, avec des noms plutôt très évocateurs. Tenez par exemple, pour les « malades », il y a « Pharmacie bar » et « Perfusion Bar ». La route est bondée de monde. Il y a beaucoup de véhicules qui vont et viennent. La population est dense. Mambanda est un quartier populaire. C’est d’ailleurs le plus grand quartier de Bonabéri. Il s’étend sur environ 500 hectares, subdivisé en 39 blocs. La population est estimée à 132 000 habitants, constituée pour la plupart de jeunes et de femmes.
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Marché Mambanda
La moto est obligée de s’arrêter un moment. En face, un taxi a engagé une manœuvre. Un grumier transportant des billes de bois déambule au loin. Nous sommes au marché de Mambanda. Les « débrouillards » établis près de la route éprouvent quelques difficultés dans ce petit bouchon qui vient de se créer. Ils doivent rapidement déplacer leur brouette ou leur plateau de marchandise. La Communauté urbaine de Douala (Cud) a pourtant placé des garde-fous, interdisant aux vendeurs de s’installer sur les emprises de la route. Mais les mauvaises habitudes ont la peau dure. Ce marché spontané, apprend-on, a été créé en 1986.
Les commerçants rapportent qu’au départ, il y avait une dame qui vendait des beignets au carrefour. Puis, progressivement, des vendeurs de bananes se sont installés. Aboubakar Moupen, le président du comité de développement du quartier à l’époque, a demandé aux habitants de créer des boutiques dans cet emplacement initialement réservé à la Campost. Aujourd’hui, le marché de Mambanda compte 3500 commerçants, selon les chiffres avancés par Michel Kamdem, dit « Pa’a Mi ». Il est le président de l’association des commerçants du marché, et par ailleurs conseiller administratif. D’abord établi au bloc 15, l’espace marchand s’est étendu aux blocs 5 et 24, du fait du boom démographique que connait le coin.
« Les commerçants des marchés Rails, Ndobo, Tanko, Grand-Hangar, Bonassama et Petit marché de Bonamikano se ravitaillent ici. On y retrouve différentes denrées alimentaires : bananes, arachides, huile de palmiste, water fufu, légumes, poissons, volaille, etc »,
détaille Pa’a Mi. Il y a aussi une boucherie de porcs. En moyenne 20 bêtes y sont abattues chaque jour, affirme un boucher. Vers le développement La route principale n’est certes pas bitumée, mais les habitants tirent profit du fait qu’elle se déploie jusqu’à l’autre bout du quartier, où la société Alpicam s’est établie il y a environ 30 ans. Selon les habitants, l’aménagement de cette voie a été rendu possible grâce aux responsables de cette société de transformation de bois. La route passe, et le développement de Mambanda suit, discrètement.
Il y a des facilités dans les déplacements. Il faut débourser 200 F. Cfa à un mototaxi ou 100 F. Cfa à un taxi pour effectuer le tronçon Cimetière-Alpicam (4 km environ). Il y a aussi des cars de transport en commun, communément appelés « Cargo », qui effectuent le trajet Mambanda-Feu rouge Bessengue et Mambanda-Marché central. La course coûte 200 F. Cfa. On peut en outre rallier les quartiers voisins comme Ngwèlè et Forêt-Bar, à pied. Il suffit de traverser des ponts construits en matériaux provisoires.
«Mambanda est grand. C’est pratiquement une ville. C’est de loin le plus grand quartier de l’arrondissement de Douala 4ème. Le quartier Mambanda avance à grands pas vers le développement »,
indique Joseph Tufoin, le chef de quartier. Il étaie ses propos en parlant du boom démographique et de l’industrialisation progressive du coin. A ce titre, une station service s’est installée à l’entrée du quartier. On retrouve aussi à Mambanda, des imprimeries, une société de fabrication de savon, une société de transformation d’acier, une autre de transformation du bois (Alpicam), et plusieurs Petites et moyennes entreprises (Pme). «Il y a une augmentation de la population de l’ordre de 5% chaque trois mois », relève un conseiller administratif du quartier Mambanda.
La vie religieuse aussi est diversifiée avec la présence de cinq mosquées, une église évangélique, une église presbytérienne et un lot d’églises de réveil. Les ressortissants de diverses régions du pays cohabitent ici. Il y a à majorité des habitants originaires du département de la Menoua, les Bamoun (Ouest) et les anglophones des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Pour ceux d’entre eux qui souhaitent se détendre, le « Mambanda by Nigth » se vit au « Carrefour Wamba », au lieu-dit « St Richard » et à « Pentagone ». Animation, poissons, poulets, porcs à la braise et boisson sont au menu chaque soir.
Les pêcheries
Mambanda est situé à proximité du fleuve Wouri et du fleuve Mungo. Cette situation géographique est à l’origine de la création de deux pêcheries sur les berges du fleuve Mungo, derrière la société Alpicam. Il s’agit de « Douala Beach » et de « Bamenda Beach ». A l’aile droite de la société Alpicam, « Douala Beach » vous accueille. Cet après-midi, six jeunes discutent. L’un d’eux est occupé à apprêter le filet. La marrée est basse. Les pêcheurs partis à la quête du poisson ne reviendront que dans quelques heures, apprend-on. « Cet endroit grouille souvent de monde. Les bayam sellam (revendeuses, ndlr) des marchés Mambanda, Deïdo, Youpwé, Bonamokano et mêmes ceux de Mbanga et Souza viennent se ravitailler ici », indique Ngoum Billè, pêcheur depuis 27 ans à « Douala Beach ».
Les pêcheurs de « Douala Beach » sont une cinquantaine environ. Ils sont constitués de jeunes camerounais. Il y a dans les rangs, des Nigérians établis sur la rive, et des Maliens, nous indique t-on. « Pour pêcher à Douala Beach, il suffit de savoir nager. La plupart des pêcheurs ont appris cette activité auprès de leurs ainés. Mais nous envisageons de créer une association », relève un pêcheur. Les pêcheurs ont des pirogues et vont chercher du poisson jusque dans les campements Bwappe, Ngoti, Mboma, Komba Moukoko. Ils reviennent pendant la marrée haute avec tout type de poisson, à l’exception du maquereau. On retrouve notamment le poisson machoiron, le capitaine, les carpes. Il y a également beaucoup de crustacés. Une bassine de machoirons est vendue aux bayam sellam (les duala pour la plupart dans cette pêcherie) à 45 000 F. Cfa. Un sceau de 15 litres rempli de Belolo coûte 7 000 F. Cfa.
Le coin a été découvert il y a plus de 40 ans, par des pêcheurs de passage sur le fleuve. A l’aile gauche de la société Alpicam, la pêcherie « Bamenda Beach » rassemble les revendeurs à majorité originaires du Nord-Ouest et des Nigérians. Une cinquantaine de manœuvres gagnent leur vie ici. En plus du poisson, les piroguiers ramènent du bois coupé dans les mangroves. Le bois utilisé pour la construction et le chauffage est scié et vendu sur place. Le site est mieux aménagé. Les clients attendent l’arrivée de la marchandise à « Bayelssa-Bar », un débit de boisson construit près du fleuve.
La décharge
Un petit détour par le lieu-dit « La Passerelle », et une vaste étendue tapie de contreplaqués s’étale devant nous. C’est la décharge. La société Alpicam y déverse chaque jour des déchets de bois. Les populations en profitent pour se ravitailler en sciure et en bois de chauffage. « Toute cette zone était marécageuse. Elle a été remblayée avec les déchets déversés à la décharge », explique Javis Kenah, un habitant. Il indique que les bâtisses aperçues dans les alentours ont été construites il y a six ans. « Certains riverains ont pu récupérer des chutes de planches qu’ils ont utilisées pour construire leur maison. Mais aujourd’hui, il y a des gens qui vendent ces déchets de bois. On ne les ramasse plus gratuitement, comme à l’époque», déplore le jeune homme.
Mathias Mouendé Ngamo