Douala, 30 juin 2015. Des maisons marquées de la croix de Saint André à Makèpè Missokè. Photo Mathias Mouendé

A la suite des inondations dans le département du Wouri, la Communauté urbaine a accordé 48 heures aux habitants de Makèpè-Missokè pour déguerpir. Des démolitions prévues dans d’autres quartiers d-s le 06 juillet.Michelle Valerie Kegne va passer quelques secondes avant de remarquer notre présence. La jeune dame est assise devant sa maison construite en matériaux provisoires à Makèpè-Missokè, un quartier périphérique de la ville de Douala au Cameroun. Elle a le regard perdu, la mine triste. Une grosse croix de Saint André badigeonnée en couleur rouge sur la façade de son domicile porte l’inscription « A démolir. 48 h ». Le message gravé par les agents de la Communauté urbaine de Douala (Cud) autour de 14h mardi 30 juin 2015 fait savoir à cette famille de huit personnes qu’elle dispose de deux jours pour quitter les lieux. D’autres bâtisses construites à 10 mètres de part et d’autre du drain non loin du marché de Makèpè sont également sous le coup des démolitions prochaines. Les agents de la Cud, accompagnés par des gendarmes lors de l’opération de marquage, n’ont délivré aucune explication aux propriétaires des maisons ciblées. Tout juste se sont –t-ils contentés de dire à certains habitants : « commencez à faire vos bagages ! ». Ils ont en outre enregistré les noms et les numéros de téléphone des occupants.Les propriétaires des maisons marquées pensent que cette opération fait suite aux inondations survenues dans la nuit du vendredi au samedi 20 juin 2015 dans la capitale économique du Cameroun. Mais ils soutiennent qu’ils ne savent pas où partir. Ils ont vécu pendant plus d’une dizaine d’années en ces lieux, pour la plupart. Aucun site de recasement, ni une quelconque indemnisation ne leur est octroyé. Pourtant, les démolitions annoncées ne ressemblent guère à une plaisanterie. Il suffit de lever la tête et de voir les activités qui se déroulent à quelques mètres, de l’autre côté du pont. Là, un bulldozer est stationné dans le drain. « Il est en panne », indique un des riverains. Il fait partie d’une foule de curieux qui ont les regards rivés vers le gros engin. Le bulldozer a été déployé en ces lieux samedi 27 juin 2015, mais une panne a aussitôt été enregistrée, apprend-on. A peine l’engin a repris du service mardi, qu’une autre panne a été détectée. Plusieurs maisons construites sur l’emprise du drain seront sans aucun doute démolies, lorsque le véhicule finira par fonctionner normalement.Autre lieu, à 50 mètres du pont Ngongue, toujours au quartier Makèpè-Missokè. Les bâtisses ne portent pas, ou du moins pas encore, des croix de Saint André. Le souvenir des ravages des inondations est encore vivace dans les mémoires. Les traces indiquant le niveau de la montée des eaux sont visibles sur les murs. Certains riverains ont déjà entrepris quelques initiatives pour éviter le pire, au cas où la catastrophe se répétait. C’est le cas de ces habitants du bloc 12 qui transportent des brouettes de terre vers leurs domiciles pour relever le niveau du sol. Au lieu-dit Pont Cassé, où les inondations avaient fait des ravages considérables, les autorités de la ville et des ministres de la Républiques sont descendus sur le site deux fois de suite au lendemain du sinistre. « Ils sont restés au niveau du pont. Ils ont regardé et ils ont fait des photos. Puis, ils sont repartis. Ils n’ont pas échangé avec la population. Nous somme restés dans le suspens», déplore Viviane, une riveraine. Qui relève qu’ils ont appris par voie de médias que les maisons construites le long du drain seront détruites. Quand ? Seront –t-ils dédommagés ? Les habitants n’en savent rien.4225 maisons à démolirSadrack Ebey Sandey, le chef du village Makèpè 1 Missokè en sait un peu plus. Lui qui a pris part à la réunion organisée dans les services du gouverneur de la région du Littoral samedi 26 juin 2015, en présence des ministres. Le chef rapporte que dans l’arrondissement de Douala 5ème, les cours d’eau le Nkondi, Le Ngonguè et le Tongo Bassa seront drainés. Il relève aussi que des séminaires avaient été organisés il y a plusieurs mois avec les populations de Makèpè et la Cud en vue des déguerpissements prochains. Mais les fonds pour les dédommagements n’ont jamais été débloqués. Les populations de Pont Cassé restent dans le suspens et craignent d’être surpris un matin par l’arrivée des gros engins de la Cud. Le reporter a appris que 4225 maisons construites près des drains sont à détruire dans le département du Wouri. Une source fait avoir que la Cud a recruté 400 stagiaires pour le curage des caniveaux dès le 6 juillet 2015. Un budget de 46 milliards F. Cfa est alloué à cette opération.Lors de la réunion dans les services du gouverneur, une enveloppe de 2 millions F. Cfa a été partagée au chef du village Makèpè 1 Missokè, au médecin qui s’est occupé des enfants rescapés des inondations, aux parents des rescapés et aux secouristes. Que représente cet argent remis par le ministre du développement urbain et de l’habitat ? Sadrack Ebey Sandey répond. Le chef et les secouristes ont été récompensés pour leur vaillance. Le médecin a été récompensé pour les soins qu’il a administrés aux enfants. Des informations ont fait état de ce que les mairies de la ville de Douala ont également reçu des enveloppes. Joint au téléphone, Théophile Kwapnang, le maire de l’arrondissement de Douala 3ème, a tenu à préciser qu’il s’agissait de bons de commandes pour l’acquisition de matériels tels que les brouettes, les pèles.Mathias Mouendé Ngamo

Douala, 30 juin 2015. Des maisons à démolir près du drain à Makèpè Missokè.. Photo Mathias Mouendé