La comédienne et directrice du projet « jeudi théâtre » déplore la non implication des pouvoirs publics dans le secteur culturel au Cameroun.           C’est quoi le projet « jeudi théâtre » ? « Jeudi théâtre » est un programme de diffusion de spectacles vivants qui se tient tous les deuxièmes jeudi du mois au foyer protestant de la jeunesse d’Akwa. On y retrouve du théâtre, de la danse, de la musique. C’est un espace pour promouvoir les spectacles, puisqu’il n’existe plus d’espaces de spectacle au Cameroun. Nous avons déjà travaillé avec beaucoup de musiciens, dont le groupe Bantou pô si. Nous avons accueilli des spectacles venus du Burkina Fasso, du Congo. Le 23 février prochain, « Jeudi théâtre » reçoit la compagnie « le théâtre des coulisses » de Pointe noire au Congo.  Ce n’est pas encore la grande affluence dans la salle, mais ça viendra progressivement. Nous avons lancé nos activités en 2005. Nous avons arrêté en 2008, puis nous avons redémarré il y a un an. Au fur et à mesure, les gens s’intéressent. Il y a déjà un public fidèle. Quelles sont les difficultés auxquelles vous faites face dans votre « lutte » ? Nous avons la chance que l’église nous offre son espace. Nous avons un problème de matériel, mais l’Institut français de Douala nous a donné son accord pour l’utilisation de ses lumières. Mais la salle du foyer protestant de la jeunesse est grande et nous n’avons pas une bonne qualité de son. Il faut aussi embellir l’espace. Il y a en plus, un déficit de communication de notre part. C’est dû en partie au fait que nous évoluons avec nos propres moyens. Au Cameroun, le public ne cherche pas à être curieux et aller voir du théâtre. Il n’y a pas un public pour le théâtre pour le théâtre au Cameroun. Quelle lecture faites-vous du spectacle au Cameroun ? Ceux qui font le théâtre au Cameroun s’en sortent ailleurs, à l’extérieur. Comme c’est un secteur dans lequel on dit la vérité en face et où l’on peut changer les mœurs, le ministère de la culture a peur de s’investir. Dans le théâtre on dénonce tout, les détournements et autres, et certains membres du gouvernement se sentent indexés. Il y a aussi une réticence des sponsors à soutenir le théâtre. Quand on regarde en arrière dans les années 80, on voit comment on s’alignait devant les salles de cinéma. Il était difficile d’avoir une place. Les sociétés finançaient des spectacles. On faisait le théâtre, on jouait. Aujourd’hui, les sociétés ont peur de s’investir avec les impôts en face d’eux. Après le discours du chef de l’Etat à la jeunesse le 10 février 2012, j’ai pleuré. Il a parlé de tout, sauf de la culture. Pendant la fête de jeunesse même, les enfants se divertissent à travers danse, théâtre et autres activités culturelles.   Sans culture, un pays ne peut pas vivre. On doit inculquer le théâtre dès le bas âge. L’action doit venir d’en haut. Mais le haut ne parle pas de culture, pourtant il y a des chômeurs et c’est un secteur qui peut payer. Je n’ai jamais mangé 5 F. Cfa de mon travail dans mon pays. Mon argent est celui du contribuable français. Il y a de meilleurs artistes dans ce pays qui n’ont besoin que d’encadrement. La culture est abandonnée dans le désordre. Propos recueillis par Mathias Mouendé Ngamo