Des familles à la belle étoile à Fret Aéroport. Photo: Mathias Mouendé Ngamo

Les victimes des démolitions survenues samedi 09 janvier 2021 étaient établies dans ce quartier de la capitale économique depuis une dizaine d’années.

Des débris de bois et de fer traînent au sol. Des enfants jouent sur les ruines des maisons détruites. Des hommes se livrent à la chasse des objets de valeur ayant survécu aux démolitions de la veille. Ici, un jeune garçon âgé d’une dizaine d’années,  vêtu d’une culotte noire et d’un t-shirt gris à moitié déchiré transporte des bouts de lattes au-dessus de sa tête. Ces morceaux de bois sont attachés à l’aide d’un tissu. Près du gamin, un adolescent donne des coups de marteau sur une fondation dépourvue de murs. Il essaye d’y extraire les fers ayant servi au bétonnage.

Non loin de là, des femmes sont assises à même le sol, le visage triste, le regard vide. Certaines ont placé les mains au-dessus de la tête ou aux hanches. Il est 9h47 minutes ce dimanche 10 janvier 2021 et le lieu-dit Fret Aéroport situé dans l’arrondissement de Douala 3ème au Cameroun grouille de monde. La veille, peu avant 6h, des bulldozers ont procédé à la destruction d’une centaine de maisons sur ce site près de l’aéroport international de Douala.  

“Pauvres parents que nous sommes”

Des jeunes fouillent dans les décombres à Fret Aéroport. Photo: Mathias Mouendé Ngamo

Ce dimanche matin, deux hommes discutent sur les événements de la veille debout au milieu des ruines. Hamadou Zra et Dairou Abdoue, sont des sinistrés. Ils ont assisté impuissants à la destruction de leurs domiciles construits il y a 13 ans. Ils sont descendus sur les lieux pour faire un inventaire des dégâts. Non loin de là, Abdoulaye Ngoumpouogoun, cherche à récupérer quelques meubles rangés chez des voisins épargnés par les engins destructeurs. Il réussit à repérer dans les décombres quelques ustensiles. Elles ne sont visiblement plus d’usage.

Ce père de cinq enfants a perdu deux maisons lors du déguerpissement. Dans la première il y logeait sa famille. L’autre habitation était occupée par des locataires. « Ils n’avaient pas dit qu’ils allaient casser les maisons.  Ils nous ont parlé de nettoyage de la zone Aéroport et à 30 mètres de la chaussée.  Mais maintenant on se retrouve à plus de 50 mètres et ça sans dédommagement. Ils n’ont même pas pitié des pauvres parents que nous sommes », se plaint-t-il.

La nuit à la belle étoile à Fret Aéroport

Il ne reste plus que des gravats après le passage des bulldozers à Fret Aéroport à Douala. Photo: Mathias Mouendé Ngamo

Une Dizaine de mètres plus loin, Abdoulaye Gardina, un autre père de famille, a lui aussi été victime du déguerpissement à Fret Aéroport. Il a construit sa maison en 2000. Une maison dans laquelle il vivait avec sa femme et ses six enfants. C’est avec beaucoup de peine qu’il raconte la nuit à la belle étoile après le passage des bulldozers.

« Nous avons passé la nuit à la belle étoile, là dehors près de ce conteneur. La mosquée que vous voyez-là, on a cassé ça alors qu’il y avait une personne à l’intérieur. C’est avec beaucoup de difficultés qu’on a fait sortir cet homme. Il est actuellement à l’hôpital Laquintinie ».

 D’autres victimes ont trouvé un abri à la chefferie du quartier ou chez des proches dans les quartiers voisins. Mais il faudra encore résoudre l’équation des prochaines nuits à passer.

La plupart des sinistrés présents sur le site ce dimanche déclarent ne pas avoir été prévenus de ce déguerpissement. Ils disent avoir été mis au courant le jour-j. Mvessa, le chef du bloc 10 du quartier New Town Aéroport, assure avoir fait parvenir tous les avis et lettres de mise en demeure envoyées par la préfecture.

Nazira Aroun (Stagiaire) avec la Rédaction