Mathias Mouendé Ngamo à bord du Train Express

Bien au-delà des péripéties et des découvertes de cette aventure qui vous fascineront vous aussi, cette première expérience à bord du Train Express était aussi la réalisation d’un désir d’enfance.  Récit.

Mélomane et fan des chansons de Grand Corps Malade, j’ai appris de ce slameur français qu’il parait que les histoires d’amour sont comme les voyages en train. Des histoires d’amour, j’en ai connues. Mais les voyages en train, jamais ! Pourtant, je suis né et j’ai grandi dans un quartier traversé par les chemins de fer à Douala. Le ronronnement de la locomotive était devenue une musique familière et quotidienne. Les klaxons du train nous mobilisaient à bonne distance de la voie ferrée pour contempler le passage de ce géant métallique. Le « Mbanga-Kumba » comme on l’appelait affectueusement était si réglé qu’il nous servait d’horloge. Au quartier, tous les enfants savaient que le train passe à 11h.

On avait adopté le train qui faisait partie de notre quotidien. D’ailleurs, deux papas du quartier étaient conducteurs de train. Il est arrivé quelques fois qu’ils immobilisent ce gros engin qui pèse des tonnes pendant deux minutes, le temps de balancer quelques provisions pour leur maison, avant de poursuivre le voyage. Nous en étions fascinés. Une fois un peu plus grand, j’ai décidé que j’allais emprunter le train au moins une fois dans ma vie. L’occasion se présente en mars 2016. Je suis invité à Yaoundé pour recevoir le Prix Forest Media Award grâce à un article rédigé sur mon blog Biocamer. Mon amie Val est aussi nominée. On décide d’emprunter le train de 6h au départ de la gare voyageurs de Bessenguè. Je suis tout excité (du voyage hein…). Mais mon excitation redescend et la déception y prend place. Val est arrivée en retard à la gare et j’ai raté le train. Le tout premier que j’allais emprunter.

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J’ai à peine fermé l’œil de la nuit

Fin juin 2021, j’apprends la mise sur les rails du #TrainExpress. Une autre occasion que je saisis pour réaliser mon désir d’enfance. J’avais déjà exploré toutes les autres formes de voyages (sur terre, dans les eaux, dans les airs). Mais pas encore de voyage en train sur les rails. Cette fois, je ne demande pas à mon amie Val de se joindre à moi. Je n’ai pas l’intention de rater la rame une deuxième fois. Je veux vivre chaque seconde de mon premier voyage en train et les consigner dans ma mémoire, dans mon journal de bord personnel.

Le départ de la gare de Douala à destination de Yaoundé est prévue à 6h00 le jeudi 1er juillet 2021. Comme un petit garçon, j’ai à peine fermé l’œil de la nuit. Ne riez pas. Une première fois, ça ne se rate pas deux fois. Je me réveille donc devant la gare ferroviaire à 5h15. Des dispositifs anti Covid-19 sont bien en place. Il faut d’abord passer par une sorte de Sas de décontamination. Le vigile recommande ensuite de se laver les mains au savon. Je m’exécute rapidement. Mon sac à dos passe à la machine à scanner. Moi-même je passe au relevé de la température corporelle. Et puis hop, me voici dans le grand hall.

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Embarquement dans le Train Express

Devinez alors qui je rencontre dans le hall… Mon amie Val. Oui, la même Val qui m’a fait rater le train cinq ans plus tôt dans cette même gare. Mais restons optimiste. L’histoire n’est pas obligée de se répéter. Déjà, on n’est pas dans le même compartiment. Elle est en classe Premium. Et moi, un niveau au-dessus, la Première classe. Au guichet, c’est vrai que le prix pique un peu hein. 10 000 F. Cfa pour un aller simple. Il faut penser à économiser un peu d’argent et prendre l’option du billet Première Classe en aller-retour à 17 000 F. Cfa. Val s’est arrachée un aller-retour en Premium pour 14 000 F. Cfa, au lieu d’avoir à débourser 8000 F. Cfa pour un aller simple.

Dans le grand hall, on attend. Les passagers affluent. Mon sac est bien accroché au dos. Je suis debout. Mon billet bien serré entre les mains. Bientôt, une jolie voix annonce au micro le début de l’embarquement dans le Train Express. Nous les Premières Classes, ce sera à la porte de droite. Val ira du côté gauche, loin de moi. Je rencontre mon autre amie, Carole. Elle est dans la file de la Première Classe, juste devant moi. L’hôtesse vérifie son billet. Le mien aussi. Les autres ensuite. Puis, on emprunte un escalier qui descend. Il faut encore présenter son billet à nouveau avant de monter dans le train. Carole, à la corpulence forte, éprouve une petite difficulté à défier les trois petites marches. Un petit effort et elle y parvient.

Dans notre compartiment, je suis assis sur le siège 41F près de la vitre avec une possibilité d’avoir une bonne vue sur le paysage. Super ! Moi j’aime voir les endroits quand je voyage. Mon voisin de banc s’appelle Étienne Talla. C’est un fan d’arts visuels, de mets locaux et de voyages. Il est un peu plus dégagé et a déjà commencé à lancer quelques blagues pour égayer un peu l’ambiance.

«Il n’y a pas de péage dans les voyages en train oh. Donc ceux qui aiment acheter les bobolos (bâtons de manioc) et autres marchandises en route là, oubliez »,

lance -t-il en riant, avant de se prendre en photos sur plusieurs angles à l’aide de son téléphone portable.

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Comme une montre suisse

L’embarquement à bord du Train Express se termine 10 min avant le Top départ.

Comment va se passer le voyage ? J’ai quelques appréhensions. Mais j’ai le cœur bien accroché. Il parait que les premières fois sont toujours uniques ? Quelles sont vos expériences des premières fois? Pas de temps pour attendre vos réponses. Voilà les portes de l’embarquement qui se referment à 5h50. Et comme prévu, le Train Express démarre à 6h00. Il est visiblement réglé comme une montre suisse. Quelle ponctualité ! Je crois que ça peut présager quelque chose de bon. Mais vous connaissez les Camerounais non, plusieurs ont dû louper le Top départ et sont restés sur le quai.

Ils pensaient que c’est comme à la gare routière ou alors ils se disaient que l’heure n’est jamais respectée au pays. ‘’Ils ont lu l’heure’’ … Une bonne leçon de train pour eux. Quant à moi, je suis confortablement assis. Je vous livrerai tous les péripéties de mon voyage dans le prochain billet (article). je vais vous raconter mon expérience dans les détails. Mes émotions, mes sensations, les rencontres. Ce que j’ai aimé. Ce qui m’a surpris. Aussi, ce que j’ai appris. Croyez-moi, la suite du récit est si riche que vous n’allez pas vous décoller de ce siège sur lequel vous avez pris place près de moi dans le wagon du Train Express. D’ailleurs où est votre billet ? Je vois déjà le contrôleur arrivé. Le voilà. Il est caché juste derrière le joli sourire de la serveuse.

Mathias Mouendé Ngamo