Douala le 28 avril 2021. Une vue du lycée bilingue de Bépanda. Crédit photo: Mathias Mouendé Ngamo

Situé en plein cœur de Douala 5ème dans un quartier dit très difficile, cet établissement scolaire toujours bien coté vient de décrocher la 1ère place dans le classement 2021 de l’Office du baccalauréat du Cameroun (Obc), dans la catégorie ‘’Enseignement général secondaire public’’.

Le vigile en faction à l’entrée du lycée bilingue de Bépanda ce mercredi 28 avril 2021 veille à la consigne. Il faut arborer un masque de protection faciale et passer au relevé de température. Une fois le portail franchi, le visiteur est accueilli par des messages de sensibilisation placardés çà et là sur les bâtiments. Ils invitent au respect des mesures barrières contre le Covid-19, mais aussi à la discipline et la propreté, entre autres. Le cadre est plutôt accueillant. La grande cour est propre. Des arbres (cocotiers, manguiers, safoutiers… ), des fleurs et espaces verts qui poussent par endroits créent un peu d’ombre et égaient le décor. Des seaux d’eau pour le lavage des mains sont disposés un peu partout, devant des classes.

Il est 10 h. Seuls ou en petits groupes, des élèves, en pause, font des va et vient entre leur salle de classe et la cantine. Les plus petits de 6è, 5è, Form 1 et Form 2 affrontent les évaluations de la 5ème séquence. C’est une journée ordinaire dans ce lycée qui vient de décrocher la première place au palmarès 2021 de l’Office du baccalauréat du Cameroun (Obc) dans la catégorie des établissements de l’enseignement général secondaire public, avec un taux de réussite de 79,84%. Depuis la publication desdits résultats, des commentaires ne tarissent pas. Les uns et les autres s’interrogent sur les secrets de la réussite de ce lycée qui tranche complètement avec son environnement. Situé en plein cœur de l’arrondissement de Douala 5ème, dans un quartier dit très difficile, le lycée bilingue de Bépanda est toujours cité dans le Top classement de l’Obc.

Ingrédients de la réussite

Des élèves dans la cours du lycée bilingue de Bépanda à Douala. Crédit photo: Mathias Mouendé Ngamo

Quel est le secret de ce palmarès constant? Le proviseur donne les ingrédients dans une petite formule :

« C’est le travail. Une abnégation sans faille. Beaucoup de discipline surtout. Les deux-là combinés, ajoutés à beaucoup d’ingrédients qui se rajoutent à ce cocktail produit le résultat que nous avons »,

explique Thamar Eboa Ndengue.

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Mais pour décortiquer ces propos, il faut aller puiser dans le vécu quotidien de ce lycée où la discipline est de mise et débute dès le portail. Le proviseur qui arrive de bonne heure rejoint ses collaborateurs au portail. Elle tient une paire de ciseaux en main. Un des censeurs a toujours une bobine de fil rouge avec elle. Le premier instrument est utilisé pour tailler toutes les jupes trop serrées, les pantalons slims (trop serrés) à la Fally Ipupa. La bobine de fil rouge est remis aux élèves qui n’ont pas de nom inscrit sur l’écusson. Ils doivent le broder séance tenante.

«On ne franchit pas le portail sans uniforme conforme»,

martèle Charlotte Toko, censeure des classes de 2Nde et Première.

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Même si la tenue bleu ciel et bleu marine est commune à plusieurs lycées bilingues et certains collèges, Charlotte Toko assure qu’il est très facile de distinguer des élèves du lycée bilingue de Bépanda au milieu de cent autres arborant la tenue de même couleur. «Regardez bien, les pantalons pas serrés pour les garçons. Les jupes au niveau des genoux pour les filles. Tous les élèves ont des chaussures de couleur blanche et des chaussettes blanches montantes sans motif. Les cheveux sont bien coiffés», décrit-t-elle en pointant du doigt un groupe d’élèves dans la cour. Une harmonie qui offre une belle image lors de la cérémonie de levée des couleurs. Un moment pendant lequel la proviseure saisit toujours l’occasion pour s’entretenir avec ses élèves sur des sujets comme la politesse, la morale, les drogues.

Anticipation

Les drogues ! Ekenke Njoh, surveillant général, le reconnait. Il y a des distributeurs qui rodent près du lycée. Mais le proviseur a pris attache avec le commissariat du 7ème arrondissement et la brigade territoriale de Bépanda, située non loin, pour y remédier.

«Il y a quelques enfants qui nous dérangent avec les drogues, mais le taux de délinquance est faible. Le proviseur est aux trousses »,

rassure le surveillant général.

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Il relève qu’une des clés du succès du lycée se trouve dans le caractère anticipatif et visionnaire du proviseur, mais aussi chez le personnel enseignant présenté ici comme professionnel, ponctuel avec un taux d’absentéisme très faible.

«Le chef d’établissement a pris des mesures d’accompagnement pour que les enseignants soient motivés et donnent le meilleur d’eux. Même les nouveaux enseignants qui arrivent se mettent au pas et ne jonglent pas. La discipline commence par le proviseur qui est très ponctuelle. Il est aussi de coutume qu’un enseignant, un vigile ou un balayeur reçoive une lettre de félicitation signé du proviseur et du délégué. Ce sont des choses qui encouragent », témoigne Etienne Biboum, un enseignant de Mathématiques au lycée depuis 8 ans.

Dans la méthode des enseignants, il y a cette technique qui consiste à passer des travaux dirigés aux élèves des classes d’examen tous les lundis, mercredis et vendredis. Etienne Biboum note aussi qu’il y a une concurrence « saine » entre les enseignants qui veulent avoir la meilleure classe.

Le cadre et la discipline

Qu’en est -t-il des élèves ? Charlotte Toko fait savoir que plusieurs d’entre eux résident à Bépanda et sont issus de couches défavorisées, mais ont le cœur à l’ouvrage.

«Ces enfants-là sont réceptifs. Ils savent qu’ils doivent relever le défi et se mettent au travail. Malgré les conditions socio-économiques difficiles, quand il s’agit d’école, les parents du quartier Bépanda s’y mettent. Ils ont compris que leurs enfants peuvent les sortir de la pauvreté »,

soutient Charlotte Toko.

Les élèves quant à eux apprécient le cadre et la discipline. « Ici, c’est très strict. Il y a trop de discipline. Les enseignants sont très ponctuels. Le proviseur ne blague pas. En cas d’indiscipline, il y a les punitions, les corvées et les renvois », souligne Jaelle Mvoukeng, élève en classe de Première A4 Allemand.  

Mathias Mouendé Ngamo