Emile Parfait Simb, le fondateur de Liyeplimal

Le patron de Liyeplimal au centre de la controverse aujourd’hui qui se revendique 300 000 clients à travers le monde et trône à la tête de 23 entreprises a connu une trajectoire jalonnée de rebondissements.

Au Cameroun, parler de cryptomonnaie renvoie immanquablement à un nom précis, celui de Emile Parfait Simb. Le patron du groupe Global Investment Credit s’est fait un nom dans cet univers encore très peu développé au Cameroun et dans plusieurs pays de la sous-région. Sa marque Liyeplimal (la pauvreté est finie, en langue bassa) bien qu’aujourd’hui en débat sur les réseaux sociaux a visiblement attiré grand monde et participé à la démocratisation de la cryptomonnaie au sein des consommateurs.

Le jeune camerounais qui se revendique 300 000 clients à travers le monde, dont 20 000 au Cameroun est en outre aujourd’hui propriétaire de 23 entreprises spécialisées dans divers domaines et établies à travers le monde. Mais comment Parfait Simb a-t-il procédé pour se bâtir tout cet empire ?   

L’histoire d’Emile Parfait Simb commence alors que cet ingénieur en informatique est enseignant vacataire en informatique dans des lycées et collèges à Douala entre 2007 et 2016. Il enseigne notamment au lycée Mongo Joseph et au collège Chevreuil. Dans ce dernier établissement scolaire, il exerce entre septembre 2015 et janvier 2016. Son salaire vient de passer de 50 000 F. Cfa à 92 000 F. Cfa. Il démissionne.

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Au commencement du business

Emile Parfait Simb découvre la cryptomonnaie en février 2016 par le biais d’un ami. Celui-ci lui paie son premier voyage à l’international. Destination : Dubaï. A Dubaï, Emile parfait Simb fait une formation en Forex, le trading des matières premières et devises. Son ami lui conseille de se concentrer sur les cryptomonnaies. Il suit ce conseil. Emile Parfait Simb revient au Cameroun en juin et effectue quatre premiers placements en décembre 2016. Les cryptomonnaies valent à peine 0.001 dollars. Il en acquiert pour 200 000 F. Cfa. Et au mois de mai, il se retrouve avec 55 000 dollars dans sa cagnotte, soit un peu plus de 35 millions F. Cfa. Le jeune Parfait a les yeux qui brillent.

A Douala où il est basé, il reçoit l’appel d’un homme âgé qui se propose de lui racheter des cryptomonnaies pour une valeur de 5 millions F. Cfa. La transaction en ligne est effectuée et l’acheteur lui remet du cash comme convenu.

«Je garde les 5 millions F. Cfa sous le lit pendant sept jours. J’ai peur de recevoir un appel me demandant de les restituer. Mais le monsieur me rappelle après une semaine indiquant qu’il en veut encore pour 2 millions F. Cfa »,

s’étonne Parfait qui commence à prendre conscience de la mine d’or sur laquelle il est assis.

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Global Investment Trading

Le jeune qui rêve depuis des lustres de faire des  économies et aller vivre au Canada revoit rapidement ses ambitions. En août 2017, il a 57 000 dollars dans son compte en ligne. Il a tout juste 34 ans. Il décide alors de créer Global Investment Trading, spécialisée dans l’chat et la vente rapide des cryptomonnaies et la formation en trading des cryptomonnaies.

Le jeune entrepreneur s’offre un petit bureau au quartier Bali à Douala. Le personnel est constitué d’une secrétaire et de cinq traders. Il s’occupe au préalable de leur formation. Entre août et octobre 2017, quelques personnes intéressées achètent des cryptomonnaie, mais beaucoup plus par suivisme. Quand la valeur des cryptomonnaies chute quelques temps après, les clients pensent à l’arnaque. Emile Parfait Simb est plusieurs fois convoqué à la gendarmerie. Mais les officiers n’y comprennent rien à ce nouveau système.

Emile Parfait Simb retient la leçon et planche sur comment faire afin que les clients ne soient plus impactés par les fluctuations de cette monnaie virtuelle. En novembre 2017, il crée Liyeplimal. Il protège la marque à l’Oapi en décembre de la même année. A cette période, le Bitcoin connait une évolution exceptionnelle. Le Rippel passe de 0,0017 dollar à 3 dollars. Les placements sont plutôt juteux.

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Le spectre de Mida plane

Emile Parfait Simb entreprend de faire des tournées pour expliquer le concept de la cryptomonnaie et former au besoin. Une première tournée nationale l’amène à Maroua, Garoua, Ngaoundéré, Bafoussam et dans la région du Littoral. Il organise ensuite un Liyeplimal Africa Tour qui le conduit dans des pays d’Afrique Francophone comme la Côte d’Ivoire, le Mali, le Burkina Faso, le Benin, le Togo, la Guinée-Conakry. Quand la Mida vient à fermer ses portes au Cameroun, c’est un coup dur pour Liyeplimal qui est désormais appelé la «Mida Digitale ».

Bon an mal an, l’entreprise fait son bonhomme de chemin. Seulement, le moyen de paiement commence à faire défaut. Emile Parfait Simb introduit un dossier à UBA pour des cartes Visa prépayées co-brandées pour permettre à ses clients d’effectuer des retraits à travers les cartes Visa. Entre janvier 2019 et décembre 2020, près de 15 000 cartes sont achetées à UBA et revendues aux clients.

Le business est florissant. Le portefeuille affiche 300 000 clients dans le monde, dont 20 000 au Cameroun et plus de 800 emplois directs dans son pays natal. Grâce au business de la cryptomonnaie, Emile Parfait Simb amasse assez de fonds et se bâtit un véritable empire. Les bénéfices des Limocoins lui permettent de créer 23 autres entreprises dans différents pays. L’homme d’affaires est ainsi à la tête d’une entreprise de Btp, d’une compagnie aérienne (avec deux avions) en République centrafricaine. Il est propriétaire d’une microfinance. Parfait Simb investit aussi dans l’agriculture, l’élevage. Il a lancé des chantiers de construction de cités. Il a un projet de lancement prochain d’une télévision, entre autres réalisations.   

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« Je subis une cabale énorme »

Au fil des années, le milieu de la cryptomonnaie attire de nombreux autres entrepreneurs. Certains se lancent et disparaissent quelques mois après. L’absence de règlementation ne favorise pas une régulation. En mars 2020, Emile Parfait Simb dépose un dossier de proposition à la Commission de surveillance des marchés financiers d’Afrique centrale (Cosumaf) pour y remédier. En octobre 2020, le ministère des Finances du Cameroun fait une sortie pour interdire toute transaction. L’entrepreneur pour sa part délocalise son business à Dubaï, où il dit avoir un agrément.

Avec un total de 250 000 clients à cette date-là, Emile Parfait Simb se rapproche d’un partenaire de UBA pour obtenir des cartes pour le retrait des fonds. En 2021, ces cartes ne sont plus valables. Les malheurs de Simb ne s’arrêtent pas là. Victime de vol dans son entreprise. Un de ses proches y est impliqué. Le jeune entrepreneur intente une action. Il reçoit en retour aussi, une citation directe. Elle se retrouve dans les réseaux sociaux. Des clients se précipitent pour des retraits massifs sur sa plateforme.

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Côté en bourse

Octobre 2021. Emile Parfait Simb qui pense à sécuriser sa plateforme et la décentraliser, décide de la tokeniser. En d’autres termes, il la côte en bourse. Seulement, même si tous les utilisateurs détiennent leur argent en ligne ou dans leur téléphone, il se pose toujours l’absence d’un moyen de paiement. Une fois de plus, la renommée de l’entreprise prend un coup. Le nom du promoteur est mêlé à toutes les sauces sur les réseaux sociaux. Des souscripteurs en colère, incapables d’entrer en possession de leur argent, crient à l’arnaque. Le rêve s’effondre. Alors que l’étau se referme sur lui, Emile Parfait Simb s’en défend.

« Je subis une cabale énorme. Je savais que ce jour pouvait arriver. J’ai créé plus de vingt entreprises derrière la cryptomonnaie pour en être le socle, la garantie de cette entreprise de cryptomonnaie. Ce n’est pas une pyramide de Ponzi. Nous sommes des Traders et notre business repose sur 23 entreprises. Avant tout dépendait de moi, de la Blockchain privée. Aujourd’hui, j’ai ouvert sur cinq marchés »,

précise -t-il.

Pour ce magnat de la cryptomonnaie, d’ici cinq ans, cette monnaie virtuelle va prendre le dessus sur la monnaie classique. Il déplore néanmoins le fait que, bien que la cryptomonnaie existe depuis 2009, très peu de pays dans le monde y ont déjà trouvé un cadre règlementaire. Et pour le cas du Cameroun, “90% des clients ne savaient même pas dans quoi ils se sont lancés au départ”.

Mathias Mouendé Ngamo